Longtemps perçue comme une puissance périphérique au sein du système européen de sécurité, la Pologne s’est imposée, depuis 2022, comme un acteur central de l’architecture euro-atlantique. Cette montée en puissance marque l’aboutissement d’une trajectoire entamée dès la fin de la guerre froide, lorsque la Pologne, tournée vers l’Ouest, a intégré l’OTAN (1997) puis l’Union européenne (2004).
- En rupture avec la tendance européenne à la rationalisation des forces, elle vise désormais à bâtir la première armée de Terre du continent d’ici 2035, dans une logique de dissuasion conventionnelle face à Moscou.
- Appuyée sur un consensus politique transversal qui englobe même la gauche, cette stratégie renforce la crédibilité militaire de la Pologne et en fait une puissance structurante du flanc Est de l’Alliance.
- Ceci, malgré une polarisation très forte (EIH 22/10/23).
- Comme l’explique à Amélie Poinssot de Médiapart le ministre des affaires étrangères polonais, son pays “est déja une cible pour la Russie” .
- Mais le pays, très atlantiste, pourra-t-il encore compter sur l’ami américain ?
- C’est incertain. Qui voudrait mourir pour le corridor de Suwalki?
- Sous l’impulsion du Premier ministre Donald Tusk, revenu au pouvoir fin 2023 (V. EIH 22.20.23), Varsovie a ainsi fait de la sécurité une priorité absolue.
- En 2025, la Pologne a porté son budget de défense à 4,1 % de son PIB.
- Ce réarmement traduit un consensus national forgé dans une mémoire historique douloureuse, nourrie par les agressions venues de l’Est.
- Comme le rappelle l’ancien diplomate Pierre Buhler dans Pologne, histoire d’une ambition, le pays a toujours cultivé une conscience importante de sa vulnérabilité géopolitique,
- développant alors une identité de rempart face aux menaces extérieures, depuis les invasions mongoles du XIIIème siècle jusqu’à celles de l’armée rouge.
- Aujourd’hui, la Pologne est devenue une pièce maîtresse du dispositif stratégique européen, avec laquelle les pays de l’Ouest – historiquement les puissances dominantes – doivent composer. Ce réarmement sans précédent se double d’investissements massifs :
- 155 milliards d’euros sont prévus pour moderniser les infrastructures stratégiques, renforcer les capacités militaires, sécuriser la frontière orientale.
- C’est en particulier le cas avec le projet « East Shield« , un bouclier de haute technologie face à la Biélorussie.
- L’objectif est de hisser l’économie polonaise au même rang que ses partenaires d’Europe de l’Ouest.
- L’ambition polonaise dépasse la seule défense nationale.
- A la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne depuis janvier 2025, la Pologne porte une vision affirmée d’une Europe plus souveraine et capable de se protéger sans dépendre exclusivement des États-Unis (EIH 16/12/24).
- Donald Tusk plaide pour un réarmement européen coordonné, appuyé notamment sur un endettement commun, à l’image du plan de relance post-covid .
- La Pologne s’est alors aussi rapprochée d’Airbus et participe à plusieurs initiatives industrielles européennes, tout en veillant à la localisation des productions sur son sol.
Tout ceci explique largement la volonté de la France d’orchestrer un rapprochement militaire avec la Pologne, passant notamment par la constitution d’un nouveau traité de coopération.