Malgré quelques nouvelles encourageantes en Pologne (cf. EIH 22/10/23), voire en Slovaquie, où par ailleurs l’opinion qui avait élu Fico (cf. EIH 8/10/23) sur le refus de l’aide à l’Ukraine semble avoir évolué encore, l’Europe centrale a été une source d’inquiétudes constantes sur l’état de la démocratie et de l’Etat de droit dans l’UE. Une certaine faiblesse des traditions démocratiques et les ingérences étrangères dans l’espace public sont des facteurs, mais ne suffisent pas à tout expliquer.
- Pour autant, une analyse au fond de deux professeurs de la LSE s’interroge : que peut-on apprendre à observer les jeux contraires de la démocratisation et de l’”autocratisation” dans la région ? Ils en tirent 4 leçons intéressantes :
- Premièrement, l’héritage direct du passé pèse moins lourd qu’on ne le pense souvent.
- La capacité des acteurs politiques à recadrer ces héritages, à se réinventer et à changer la donne est cruciale.
- Deuxièmement, une définition figée des acteurs politiques comme étant, par essence, soit des gentils libéraux et pro-démocratiques, soit des méchants illibéraux, populistes et autocratiques, est trop superficielle pour comprendre la situation.
- Troisièmement, en se concentrant fortement sur les partis, les élections et les institutions formelles, on risque de sous-estimer les origines et la force des tendances.
- Enfin, et surtout, les chercheurs devraient à l’avenir éviter la tentation de « qualifier » prématurément l’histoire de la région, qu’il s’agisse d’une réussite démocratique ou d’une étude de cas d’échec autocratique rampant, et se concentrer plutôt sur les trajectoires changeantes et les sources inattendues de changement politique.
- Comme le rappelle la chercheuse Nathalie de Kaniv pour la Fondation Robert Schuman, on peut, en Europe centrale et orientale, être Européen. En d’autres termes être libre, moderne et indépendant.
- Le 24 février 2022 a dévoilé une frontière orientale de l’Europe, celle que l’Occident a ignoré pendant trop longtemps :
- les territoires et les peuples soumis véritablement à la menace d’une agression de la Russie et ayant choisi le destin européen assorti d’un non-alignement avec l’immense voisin avide de restauration impériale.
- Les jours suivant l’invasion ont mis en lumière une communauté de destin qui a inspiré ces peuples européens.
- Si cette Europe semble avoir disparu avec les Accords de Yalta, elle a tenté de réémerger à Budapest en 1956, à Prague en 1968, a résisté avec le rock underground des années 1970, s’est illustrée avec la chaîne humaine de 600 km en 1989.
- Si le momentum n’a pas été saisi par les anciens Etats membres de l’UE en 2005 avec la Révolution orange et en 2013 2014 avec l’euroMaïdan en Ukraine, 20 ans après le grand élargissement, la donne a changé.