Les observateurs le soulignent depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie : les forces révisionnistes de l’ordre international, hérité de 1991 et dominé sans partage par les Etats-Unis, gagnent en dynamique. Avec l’impuissance de l’ONU à enrayer l’escalade au Proche Orient (cf. EIH 20/10/24), et les limites évidentes de l’UE prisonnière de ses contradictions migratoires ou géopolitiques, c’est aux sommets des BRICSque l’actualité des relations internationales semble se développer (cf. EIH 17/4/23, 27/8/23, 2/9/23, 17/9/23 etc.).
- Du 22 au 24 octobre a eu lieu, à Kazan en Russie, un sommet des “BRICS”.
- Un acronyme dépassé aujourd’hui, puisque les cinq pays (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) des débuts il y a seize ans sont maintenant le noyau du forum du “global south”,
- Ce forum cherche année après année à équilibrer la prééminence (particulièrement économique et monétaire) des Etats-Unis.
- Un élargissement de portée signifiante pour l’ordre mondial souligne le Carnegie center.
- Réunis à Kazan, en Russie, avec en prime la venue du secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, ce qui n’a pas manqué de susciter les craintes de l’Ukraine.
- La réunion aura ainsi permis à V. Poutine de ne pas risquer une arrestation mandatée par la Cour Pénale Internationale, ce qui l’avait dissuadé de rejoindre le sommet 2023 en Afrique du Sud (V. EIH 27/08/2023).
- Une preuve que les BRICS ne sont pas nécessairement en rupture avec l’occident sur toute la ligne.
- S’ils ne s’alignent pas sur les sanctions occidentales envers la Russie pour son invasion de l’Ukraine, le Brésil, l’Inde ou l’Afrique du sud ne recherchent pas la confrontation avec l’occident assumée par Moscou, ou Beijing.
- Toutefois, V. Poutine, en tant qu’hôte, a profité du sommet pour envoyer deux messages distincts que les occidentaux ne peuvent pas ignorer :
- La Russie est loin d’être isolée diplomatiquement et économiquement, et les sanctions à son encontre n’auront donc qu’un effet limité.
- Les pays aux économies en développement ne souhaitent pas s’aligner sur les politiques occidentales américaines et européennes.
- Elles cherchent à constituer une alternative réminiscente du mouvement non-aligné de la guerre froide.
- L’alternative se concentre surtout en matière monétaire.
- Le projet central au programme du sommet cette année a été la création d’un système de paiement alternatif au SWIFT.
- V. Poutine a fait de la dé-dollarisation de l’économie mondiale un cheval de bataille du sommet, motivé en partie par la survie de l’économie russe.
- Toutefois, aucun progrès notable n’a été fait sur ce point, l’Inde et le Brésil étant particulièrement réticents à laisser le forum des BRICS devenir une plateforme anti-occidentale et à laisser la Chine prendre l’ascendant sur les échanges entre membres du forum.
- Ces deux pays ont réitéré leur demande de trouver un accord de paix pour l’Ukraine, un engagement passé presque inaperçu dans le communiqué de fin de sommet jeudi face à la longue condamnation des frappes israéliennes au Liban et en Palestine.
- Des préoccupations notamment soulevées par deux des nouveaux membres du forum diplomatique, l’Iran et les Emirats Arabes Unis.
Le rayonnement diplomatique du forum a pu être renouvelé également grâce à l’accord passé entre la Chine et l’Inde sur un conflit territorial qui les oppose depuis des décennies. Un rayonnement qui ne peut que profiter à Poutine, décidément pas aussi isolé que ce que les Occidentaux souhaiteraient.