Entre le 5 et le 10 mai 2024, le numéro 1 chinois, Xi Jinping, a entrepris sa première tournée diplomatique en Europe depuis cinq ans et la fermeture du pays des suites de la crise sanitaire. Mais sans passer par Bruxelles : dans la perspective chinoise, l’UE n’est pas un bloc, et il faut courtiser individuellement les pays européens (comme il l’avait fait déjà avec Paris, ou comme Berlin l’a tenté, cf. EIH 21/4/24), pour éviter de se retrouver face à une Europe unie.
- Sur fonds de tensions géopolitiques, il s’agissait aussi pour le dirigeant chinois de témoigner son soutien indéfectible à la Russie de Vladimir Poutine et de manifester son opposition à la domination américaine dans le contexte tendu d’une nouvelle “guerre froide” sino-américaine.
- Le choix des pays à visiter n’était donc pas anodin et revêtait une grande importance stratégique.
- Le président chinois a donc opté pour un triptyque relativement étonnant aux premiers abords : la France, la Serbie et enfin la Hongrie.
- Le Financial Times a qualifié la tournée européenne de Xi Jinping de ‘non-productive’ dans l’un de ses éditoriaux, mais c’est une question de perspectives.
- Commencer par la France relevait d’abord du symbole.
- Le 6 mai 2024 marquait les 60 ans des relations franco-chinoises, un symbole puissant pour la Chine car la France se présente comme le candidat idéal en raison de son indépendance historique vis-à-vis des États-Unis.
- Ses prises de décisions audacieuses contre son allié traditionnel, en passant de la sortie du commandement intégré de l’OTAN par le Général de Gaulle en 1966, ou le discours de Dominique de Villepin contre l’intervention en Irak à l’ONU en 2003.
- Cela s’est ressenti par les maintes allusions historiques sur le général de Gaulle faite par le leader chinois, comme le rapport l’organe anglophone officiel du parti communiste chinois.
- Autre symbole : la visite à Belgrade commémorait aussi l’incident tragique du bombardement de l’ambassade chinoise de Belgrade, où trois journalistes chinois avaient perdu la vie lors d’une frappe de l’OTAN menée par les États-Unis en 1999, en pleine guerre du Kosovo.
- À l’époque, cet événement avait déclenché une forte réaction nationaliste en Chine, une mémoire régulièrement ravivée pour ses besoins par le PCC.
- Une commémoration qui permet donc de manière explicite de rappeler le coût des ingérences américaines, et souligner en conséquence la nécessité d’un nouvel ordre international.