Le 16 novembre 2023, la Commission européenne a finalement donné son feu vert pour prolonger de 10 ans l’autorisation du glyphosate dans l’UE. Pour rappel (cf. EIH 15/10/23), l’autorisation du glyphosate expirant le 15 décembre 2023, les États membres devaient se prononcer, à la majorité qualifiée, sur le renouvellement du glyphosate pour 10 ans, sous peine de laisser la décision à la Commission, dont la position favorable était connue.
- Le 13 octobre 2023, les États membres avaient déjà échoué à trouver une majorité qualifiée (15 États sur 27) et le vote d’homologation avait été reporté.
- Un peu plus d’un mois après, le 16 novembre, les représentants des Etats n’avaient toujours pas réuni de majorité.
- L’absence de majorité revient à laisser la Commission décider, donc à un soutien implicite à la décision.
- Les principales puissances agricoles européennes se sont abstenues au moment du vote : l’Allemagne, l’Italie, la Belgique, les Pays-Bas et la France.
- Le Luxembourg, la Croatie et l’Autriche ont voté contre, comme lors du premier vote.
- Pour l’Allemagne, hostile au glyphosate (contrairement à sa position de 2017), il s’agissait d’un compromis interne à sa coalition gouvernementale.
- Pour Paris, l’abstention réitérée est un signal ambivalent qui, s’il ne vaut pas refus, ménage un entre-deux entre organisations écologistes et syndicats agricoles.
- Une position assumée par le ministre de l’Agriculture français qui affirme ne pas être « contre le principe du renouvellement de la molécule ».
- Ce dernier pondère cependant en affirmant « regretter » que la Commission n’ait pas intégré une restriction dans l’usage de l’herbicide dans la proposition de reconduction.
- Ce regret est partagé par Pascal Canfin, président de la commission ENVI du Parlement européen.
- Il réfute et conteste l’argument de « manque de temps » de la Commission.
- La prolongation suscite des inquiétudes et des interrogations. Le glyphosate a été, en 2015, classé comme « cancérogène probable » par le Centre international de recherche sur le cancer de l’OMS.
- Cette étude a été contestée par l’EFSA, qui indique que l’herbicide ne présente pas une « préoccupation critique » chez les êtres humains.
- La Commission interdit cependant l’usage de la substance pour les pratiques de dessiccation.
- Les réactions sont contrastées :
- Bayer Monsanto, géant de l’agrochimie et objet d’une plainte par des associations pour fraude grave (cf. EIH 02/10/2023), n’a pas manqué de partager sa réjouissance.
- Les ONG Foodwatch et Générations futures dénoncent une enfreinte au principe de précaution face aux risques pour la santé humaine.
- Ils regrettent cette décision « illégale » prise sans le soutien des citoyens et des États membres
- A noter que la reconduction à l’échelle européenne de l’herbicide ne prive pas les États membres d’adopter des mesures plus restrictives.