Le destin de l’Europe se joue en Méditerranée, écrivions-nous il y a déjà 5 ans. De tous les défis existentiels qui menacent les équilibres internes de l’UE et plus généralement la paix civile, c’est finalement sur les migrations que nos sociétés riches, vieillissantes et inquiètes semblent se focaliser. Car cette “crise migratoire” qui nourrit les paniques morales et les affolements identitaires est au fond d’abord une crise de “l’accueil d’urgence des migrants”.
- Relancée par l’arrivée de milliers de migrants à Lampedusa, elle rappelle la sidération devant les images de ces flux humains sur la “route des Balkans” en 2015 et les comportements choquants de la police hongroise.
- Encore une fois elle met en lumière la violence policière qui s’abat sur ces êtres humains fragilisés par leur situation – souvent abusés, trompés, volés voire violés – de toutes les frontières.
- Le film “la frontière verte” d’Agnieszka Holland qui montre le traitement inhumain de la police polonaise à la frontière biélorusse embarrasse le gouvernement à la veille des élections.
- L’Europe n’a toutefois pas le monopole des horreurs, comme en témoigne le sort réservé aux migrants subsahariens à la frontière tunisienne.
- Incapable de concevoir une solution européenne à un problème qui n’est certainement pas national, l’Union voit l’un de ses principes cardinaux, celui de la libre circulation des personnes, menacé par le rétablissement des contrôles aux frontières au sein même de l’espace Schengen.
- La Pologne veut ainsi renforcer les contrôles à sa frontière avec la Slovaquie pour limiter l’arrivée de migrants en provenance des Balkans.
- L’Autriche impose des contrôles plus stricts à ses frontières avec la Slovénie et l’Italie.
- L’Allemagne accroît ses contrôles à la frontière autrichienne mais c’est surtout sa décision de renforcer ses contrôles frontaliers avec la Pologne et la Tchéquie qui inquiète, tant par sa force symbolique que par ses conséquences concrètes.
- Le chancelier allemand accuse Varsovie de laisser les migrants transiter en Allemagne, grâce au principe de libre circulation de l’espace Schengen, au lieu de traiter leurs demandes d’asile en Pologne.
- Le gouvernement polonais est aussi empêtré dans un scandale de corruption de vente de visas Schengen à des migrants originaires de pays d’Asie et d’Afrique.
- Avec sa position ferme dans cette dispute migratoire avec la Pologne, le gouvernement allemand espère également pouvoir freiner la montée de l’extrême droite.
- Quant au gouvernement PiS à Varsovie, les élections législatives du 15 octobre 2023 rendent la situation encore plus tendue.
- Les accusations de vente illégale de visas sont dénoncées comme des ingérences dans les affaires intérieures du pays.
- Le chancelier allemand est accusé d’intervenir en faveur de l’opposition polonaise.
- Très peu diplomatiquement, le ministre des Affaires étrangères polonais a directement demandé au Chancelier allemand de “respecter la souveraineté de son pays.”