A l’heure des reculs en matière de règlementation environnementale, il est intéressant que ce soient à ce point les industries emblématiques du 20e siècle qui soient ainsi mobilisées – le cas de l’automobile est flagrant.
- Dans un rapport de 2023, déjà, la fondation Jean Jaurès analysait la situation de « l’industrie automobile allemande face aux exigences environnementales de l’Union européenne ».
- L’étude met ainsi en lumière le dilemme majeur de l’industrie automobile allemande :
- d’un côté, les contraintes européennes croissantes pour réduire les émissions de CO₂ — notamment l’interdiction des véhicules thermiques neufs dès 2035 —
- et de l’autre, la dépendance économique d’un secteur clé pour l’Allemagne.
- Les constructeurs allemands plaident pour une « neutralité technologique », souhaitant promouvoir les carburants de synthèse (e-fuels) comme alternative aux voitures électriques.
- L’objectif est de préserver leur savoir-faire historique du moteur thermique.
- Ce positionnement révèle les tensions entre impératifs écologiques et compétitivité industrielle, alors que la transition vers l’électrique est perçue comme coûteuse, risquée et susceptible d’affecter l’emploi.
- L’étude souligne aussi la nécessité d’un dialogue européen qui prenne en compte la dimension sociale et l’intérêt stratégique du secteur automobile allemand.
- Comme le disent les constructeurs français, la trajectoire est mauvaise.
- Le plus intéressant est combien, face à ces difficultés structurelles, l’industrie (quand elle ne triche pas avec les normes, #Dieselgate) n’a jamais investi suffisamment, ni assez tôt, dans les technologies de nouvelle génération.
- En particulier dans le passage à l’électrique, dont la technologie connaît une courbe de croissance typique des industries émergentes, tant en termes de prix que de performances.
- Une nouvelle génération de concurrents chinois plus agiles et privilégiant l’électrique surpasse déjà les constructeurs européens en matière d’innovation et de stratégie, comme le soulignait Forbes il y a peu.
- Même si le changement de la législation européenne permettait d’autoriser les « hybrides rechargeables », le problème est que les constructeurs automobiles chinois les supplantent également dans ce domaine.
- Comme le rappelle le FT, c’est une dynamique devenue structurelle :
- la Seal U de BYD est déjà l’hybride rechargeable la plus vendue en Europe avec une croissance de 880% sur l’année dernière.
- Outre les erreurs marketing de positionnement de segment, c’est aussi surtout un effet de l’impact contre-productif des droits de douane imposés par l’UE sur les voitures électriques chinoises.
- Les constructeurs automobiles chinois se sont simplement tournés vers la vente de véhicules hybrides rechargeables non concernés par ces droits, ni par les autres barrières non tarifaires.
- L’assouplissement de la cible 2035 ne sauvera pas l’industrie automobile allemande ni européenne.
- Pire, il pourrait la maintenir dans le segment bas de la technologie.
- Freinant ainsi le passage au tout électrique quand les caractéristiques technologiques seront acceptables pour le grand public.
- Encore une question existentielle pour l’Europe sur laquelle la réponse manque d’audace et de vision stratégique.