Wojciech Przybylski, dans Visegrad Insight, affirme que la Pologne ne dispose pas actuellement du climat politique nécessaire pour mettre en œuvre les réformes judiciaires nécessaires à l’obtention des fonds du FRR (Facilité pour la reprise et la résilience).
- La question reste de savoir si le feu vert donné par Ursula von der Leyen avant l’été (cf. EIH) sera suffisant pour que les fonds soient versés, alors que de nombreux députés européens et avocats font campagne contre.
- Indispensable à la majorité en place, le petit parti “Pologne Unie” dirigé par le – très remarqué – ministre de la justice Zbigniew Ziobro détient un pouvoir important au sein du gouvernement polonais et s’oppose à toute réforme en faveur d’un rapprochement avec l’Union.
- L’adoption de la réforme signifierait la destruction de ses réformes du système judiciaire polonais, ce qui entraînerait une perte de crédibilité aux yeux de son électorat.
- Ainsi, Z. Ziobro ne peut pas permettre le succès du Premier ministre Mateusz Morawiecki qui a annoncé un accord fructueux sur le FRR et les fonds structurels de l’UE, ce qui réduirait son influence.
- On relève également des difficultés du côté du président polonais Andrzej Duda.
- Sa dernière initiative législative n’a toujours pas satisfait aux exigences formulées par la Cour de justice de l’Union européenne et la Commission
- Il n’est pas impossible qu’il veuille ainsi préparer son retour à la vie politique, à l’expiration de son second et dernier mandat présidentiel en 2025, et agisse donc dans le sens d’une confrontation affichée avec Bruxelles.
- De plus, la stratégie électorale du PiS pour les prochaines élections de 2023 vise à jouer sur la guerre des cultures et la politique identitaire en détournant l’attention de la question des fonds européens vers les demandes de réparations de guerre de la part de l’Allemagne.
- Il y a donc fort à parier que la Pologne du PiS et de Ziobro ne fera plus aucune concession sur la réforme judiciaire et a annoncé son intention d’entraver le processus décisionnel de l’UE.
Du côté hongrois, il semblerait que la question de l’État de droit prenne un tour plus favorable.
- Le Premier ministre V. Orban a cédé au début des négociations du cadre financier pluriannuel sur le nouveau mécanisme de conditionnalité, sous la pression des entreprises hongroises.
- Le problème réside plutôt dans la nature systémique de la corruption en Hongrie que dans sa simple organisation institutionnelle.
- Le clivage sur cette question est représentatif de tensions plus profondes dans l’alliance polono-hongroise que la guerre en Ukraine a accentuées.
- Ces désaccords portent sur la responsabilité de la Russie dans la guerre et la divergence en termes de stratégie d’approvisionnement énergétique, en particulier.
- Sans parler des manifestations de sympathie de V. Orban à l’égard de V. Poutine, surtout quand on sait que l’homme est devenu une personnalité politique au moment de clamer son opposition à l’URSS dans les années quatre-vingts.
- Si l’alliance est ébranlée, l’engagement de l’article 7 contre la Hongrie reste peu probable.
- Toutefois, une entente avec la Hongrie est nécessaire pour que la Pologne puisse assurer sa stratégie d’obstruction à l’UE.
- Il est enfin question d’un accord énergétique entre la Hongrie et la Pologne permettant à cette dernière de récupérer une partie des importations de gaz russe de la Hongrie.
- L’essentiel semble donc juste de donner l’apparence d’une certaine vision de la vertu.