Dans une note pour l’Institut de la Recherche Stratégique de l’Ecole Militaire (IRSEM), Amélie Zima revient sur les récentes décisions prises par l’OTAN de renforcer sa présence dans certaines parties orientales de l’Alliance. Dans un contexte tendu par l’annexion illégale de la Crimée par la Russie puis l’éclatement du conflit en Ukraine, l’OTAN étend sa présence militaire dans une option de dissuasion.
- La chercheuse rappelle que la posture de l’OTAN sur son flanc oriental découlait de l’Acte fondateur OTAN-Russie, signé en 1997 sous la présidence de B. Eltsine avant le premier élargissement post-guerre froide de 1999 à trois pays d’Europe centrale – Hongrie, Pologne et République tchèque.
- Cependant, les équilibres, et la prudence vis à vis des présences militaires et des armes stratégiques (nucléaires) ont été remis en cause l’annexion de la Crimée en 2014.
- Lors du sommet du Pays de Galles qui s’est tenu à Newport en 2014, l’OTAN met en place une série de mesures de réassurance pour ses membres orientaux :
- le triplement des effectifs de la Force de réaction de l’OTAN (NRF), qui compte désormais 40000 soldats.
- la création d’une force opérationnelle de 20 000 soldats mobilisable en quelques jours.
- l’établissement de deux quartiers généraux multinationaux à Szczecin en Pologne et à Bucarest en Roumanie, ainsi que huit unités d’intégration des forces (NFIU) dans les pays d’Europe centrale et orientale qui doivent aider au déploiement des forces de l’OTAN et participer à la coordination des entraînements et des exercices communs.
- le renforcement de la police du ciel dans l’espace aérien des pays baltes.
- En 2016, toujours avec les mêmes objectifs de dissuasion, le Sommet de Varsovie décide de lancer un dispositif militaire renforcé (1000 hommes) et les États-Unis accentuent la pression sur leurs partenaires pour qu’ils remplissent leurs obligations budgétaires (2% pour la défense) – une exigence régulièrement renouvelée par l’administration Trump, surtout envers l’Allemagne.
- Cependant, souligne l’analyse, si le choix de bataillons multinationaux permet d’affirmer la cohésion et l’unité politique de l’Alliance, ce format pose plusieurs défis, notamment la capacité à faire travailler efficacement l’ensemble de ces troupes.
- Il semblerait que selon certains acteurs ayant participé à l’eFP, le choix multilatéral n’est pas le plus optimal en cas d’attaque et de combat mais plus adapté aux missions de maintien de la paix.
- L’eFP permet en revanche de tester l’évolution de l’interopérabilité.
- La question de l’avenir du dispositif pose un certain nombre de questions pratiques et politiques à l’OTAN.
- Rôle des bataillons, limites de l’intégration multinationale, évolution du contexte stratégique (la Biélorussie, par exemple), taille des effectifs : l’OTAN envisage d’augmenter ses forces actuelles à 300 000 personnels militaires et transformer les bataillons positionnés sur le flanc Est, dont ceux de l’eFP, en brigades (une proposition de Andrzej Duda le président polonais).
- Avant même l’invasion militaire de l’Ukraine en février 2022, Vladimir Poutine avait redonné une seconde vie à l’Alliance nord-atlantique, pourtant considérée comme à bout de souffle, par le président français par exemple.
- Ce n’est pas le moindre des paradoxes pour le président russe que d’avoir déclenché une guerre pour préserver son pays d’une menace qu’il n’aura fait que renforcer.