Nouvelle OMC?
Dans le contexte de tensions géoéconomiques entre blocs commerciaux, la présidente von der Leyen a réussi à surprendre avec une annonce audacieuse : créer une alternative à l’OMC. Effectivement, la présidence de la Commission européenne souhaite que l’UE se rapproche des pays signataires du CPTPP, afin de favoriser le libre-échange.
- Le Comprehensive and Progressive Agreement for Trans-Pacific Partnership est la version modifiée du TPP (Trans-Pacific Partnership), après le départ des Etats-Unis et la signature du Royaume-Uni, seul pays européen à en faire partie.
- Ce traité multilatéral de libre-échange avait pour but de contrecarrer l’influence de la Chine dans la région.
- Les Etats-Unis l’ont quitté et la Chine (à l’instar de la Corée du Sud ou de la Thaïlande) souhaite le rejoindre.
- Ceci inverse complètement les rapports de force et l’objectif premier du traité.
- U. Von der Leyen propose donc que l’UE se rapproche de ce traité afin de pouvoir favoriser le libre-échange, sans être freinée par les Etats-Unis.
- La déclaration de la présidente de la Commission évoque également la possibilité de créer un mécanisme de règlement des différends, de manière très similaire à l’OMC, que les Etats-Unis bloquent actuellement, et refusent de financer.
- La conséquence immédiate serait donc de proposer une alternative claire à l’OMC, au point mort à cause de D. Trump.
- Il est également intéressant de noter que le président de la commission du commerce du Parlement européen, Bernd Lange, voit cela d’un mauvais œil
- Il estime que l’UE doit rester le moteur de l’OMC, par égard au Sud Global, et que le CPTPP manque cruellement d’ambition.
- Il préfère favoriser une réforme de l’OMC, qui néanmoins aurait énormément de mal à aboutir à cause du blocage américain.
- Inévitablement, un débouclage des échanges outre-Atlantique pour se tourner complètement vers l’Asie entraînerait une instabilité certaine de nos marchés financiers.
- Les banques européennes détiennent une forte quantité de bons du Trésor américain.
- La présidente de la Commission européenne affiche clairement sa volonté de se rapprocher des pays asiatiques, afin de contrecarrer l’isolationnisme américain croissant.
- Son annonce sur le CPTPP coïncide avec la visite du ministre des Affaires étrangères chinois, Wang Yi, en Europe.
- Après s’être entretenu avec Kaja Kallas, la plus haute diplomate européenne, il doit rencontrer le premier ministre belge, puis son homologue allemand et français.
- Le contexte est particulier : l’année passée, l’UE avait décidé d’imposer des tarifs douaniers importants notamment sur les importations de véhicules électriques chinois (EIH 15/7/24).
- En retour, la Chine avait notamment décidé de taxer les produits laitiers et les spiritueux européens (et principalement le cognac français).
- Le changement à la Maison Blanche rebat les cartes. Ainsi, afin de faire retomber la pression, surtout avant un sommet clef fin juillet à Pékin avec l’Union européenne, des négociations ont débuté afin de supprimer ces tarifs douaniers – impossible réchauffement estime Le Monde.
- La piste explorée actuellement serait de fixer des prix planchers sur les véhicules électriques chinois et les cognacs français.
- La visite de Wang Yi permet également à la Chine de réaffirmer son attachement au libre-échange.
- Le but est d’éviter de nouvelles confrontations en plus de celle préexistante avec les Etats-Unis.
- Cela arrangerait également la Commission européenne, qui aurait certainement du mal à gérer deux guerres commerciales à la fois, en particulier avec ses deux partenaires les plus importants.