Dialogue de sourds et radicalisation de part et d’autre entre Varsovie et Bruxelles, sur la question de la hiérarchie des normes juridiques, vont bon train.
- Malgré la lettre publiée le 17 octobre, dans laquelle Mateusz Morawiecki, Premier ministre polonais, tente de « rassurer » ses partenaires affirmant que la Pologne « reste un membre loyal » de l’Union, il reprend les mêmes comparaisons trompeuses (voir EIH 14/10) avec d’autres arrêts de cours nationales, se déclarant « anxieux » de la « transformation graduelle » de l’UE en un « organisme géré centralement par des institutions sans contrôle démocratique ».
- Son ministre de la justice a aussi ajouté que Varsovie comptait attaquer l’Allemagne devant la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) sur la « politisation » de ses juges constitutionnels. Celle-là même dont il conteste pourtant la légitimité.
- La dimension juridique de la controverse semble dépassée par le jeu politique.
- Mardi 19 octobre, le Premier ministre polonais était au Parlement européen à Strasbourg, où – à sa demande – il venait s’exprimer pour défendre sa vision de l’État de droit.
- Il a ainsi réaffirmé son opposition à la primauté du droit européen sur les questions liées aux réformes judiciaires que son parti a fait voter ces dernières années. Il n’entend pas négocier quoi que ce soit et dénonce un « chantage » des institutions européennes.
- Il est soutenu par les élus d’Identité et Démocratie (extrême droite) et par les Conservateurs et réformistes européens (un groupe dominé par le PiS, formation qui gouverne à Varsovie).
- Les autres députés lui ont rappelé que tous les États de l’UE ont adhéré de façon volontaire aux règles communes lorsqu’ils ont rejoint l’Union et qu’il n’existait aucun conflit entre l’ordre juridique de l’UE et la constitution polonaise.
- Dans une interview au Soir, le président de la CJUE a, quant à lui, déclaré que « si le droit national devait primer sur le droit de l’Union, il n’y aurait plus un droit commun ni d’égalité entre les États membres, voire entre les citoyens de l’Union ».
- « L’État de droit est le ciment qui assure la cohésion de notre Union », a aussi répondu la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen.
- Elle n’a cependant fait aucune annonce concernant les mesures qu’elle entend prendre face à l’attitude de Varsovie alors que le Parlement européen menace d’engager une action en justice si la Commission ne fait pas usage du mécanisme de conditionnalité.
- Dans une interview au Soir, le président de la CJUE a, quant à lui, déclaré que « si le droit national devait primer sur le droit de l’Union, il n’y aurait plus un droit commun ni d’égalité entre les États membres, voire entre les citoyens de l’Union ».
- Les groupes PPE, S&D, Verts et Renew au Parlement européen ont préparé un projet de résolution, que s’est procuré Politico, demandant une action “urgente et coordonnée” de la Commission et du Conseil.
- En plus de l’activation du mécanisme de protection, le texte demande que la Commission ne donne pas son aval au plan de relance polonais et ouvre une procédure d’infraction concernant l’arrêt du Tribunal constitutionnel.
- Il demande aussi la suspension des fonds régionaux à Varsovie.
- Le professeur de droit Alberto Alemanno propose un compromis : “Nous pouvons espérer que la Commission approuve le plan national polonais tout en annonçant, sous la pression croissante de l’opinion publique, l’activation d’un nouveau mécanisme de protection de l’Etat de droit. Cela permettra de sauver la face de tout le monde tout en donnant un coup de pied dans la fourmilière.”