La guerre russe en Ukraine met l’unité de l’UE en tension permanente. L’augmentation des prix du pétrole ainsi que du gaz, dues aux potentielles rétorsions, en particulier pour certains pays membres, est devenue un des sujets les plus discutés au sein de l’Union pour parvenir à des sanctions coordonnées.
- Lundi 30 mai, s’est tenu un nouveau Conseil européen extraordinaire afin de décider des nouvelles sanctions russes, ce sera le sixième paquet de sanctions de l’Union européenne.
- La question de l’embargo pétrolier y était de nouveau à l’ordre du jour, avec en mire l’opposition de la Hongrie fortement dépendante au pétrole russe – et toujours suspecte de sympathies poutiniennes.
- Ainsi, le Ministre des Affaires étrangères hongrois, Péter Szijjártó, laissait entendre à ses partenaires de l’UE que le détachement des infrastructures et des raffineries hongroises des productions russes coûterait 700 millions d’euro.
- Après un mois de négociations, et un sommet de tensions, le Conseil européen a tranché : l’UE met fin à ses achats par voie maritime d’ici 2023, soit deux tiers de ses importations.
- En ce qui concerne la Hongrie, la Slovaquie et la République Tchèque, le Conseil ne revient pas sur les aménagements prévus.
- Cette décision met à terme à la contribution financière de l’UE à la Russie dans la guerre actuelle. Selon le Centre for Research on Energy and Clean Air, l’UE a versé plus de 54 milliards d’euros à la Russie pour ses importations de combustibles fossiles depuis l’invasion de l’Ukraine fin février.
- Selon le chercheur Cyrille Bret « Il s’agit d’un tournant : les Européens choisissent de se faire mal pour faire mal à la Russie ».
- En effet, la réduction et la fin des importations pétrolières poseront des soucis d’approvisionnement.
- Pour limiter l’impact domestique, l’Europe pourrait envisager de se tourner vers l’Afrique et le Moyen-Orient.
- En France, par exemple, le brut russe ne représente que 10% et « Le reste provient en majorité d’Afrique, avec 37% des importations via des pays tels que l’Algérie, le Nigéria ou encore la Libye ». A cela s’ajoutent 15% des importations en provenance du Moyen-Orient.
- Ce tournant est souligné aussi par le fait que l’Allemagne et la Pologne ont choisi de ne plus utiliser du pétrole russe et de ne plus importer par l’oléoduc Droujba, ce qui fait passer l’embargo européen à 90%
- Avec cette décision, l’Union fait la démonstration de sa solidarité envers l’Ukraine. Elle se pose aussi clairement la question de l’unanimité en matière de la politique étrangère européenne – un principe de plus en plus fréquemment contesté.
- Certes, le principe d’unanimité a l’avantage de démontrer clairement une unité certaine de l’UE face aux problèmes rencontrés.
- Mais il présente aussi l’inconvénient de maintenir les décisions dans un consensus mou qui accouche de décisions sans grand impact.
- L’unité est un élément tout à fait stratégique, même au sens géopolitique.
- L’exigence d’unanimité affaiblit l’Union puisqu’immédiatement instrumentalisée par V. Orban qui après avoir obtenu des aménagements a commencé à se vanter d’avoir « vaincu la Commission européenne »
- Selon Enrico Letta, V. Poutine tirerait profit de la division européenne : « Imaginez-vous ce que ça donne Vladimir Poutine qui voit cette Europe divisée. Il rigole et il continue ».
- De fait, le président de la fédération de Russie ne rencontre que rarement ces problèmes d’unanimité avec ses républiques fédérées ou les ex-républiques soviétiques. Et quand il en rencontre, sa réaction ne fait rire personne.