Zeitenwende enfin (EIH 8/12/22)? Le changement ne vient pas toujours de là où on l’attendait. Le vent de transformation que devait porter la “coalition tricolore” et ses deux forces de modernisation verte et libérale, a tourné court (EIH 21/4/24). La faute au contexte géopolitique, certainement, mais aussi aux conservatismes dogmatiques de chacun des trois partenaires, aux blocages institutionnels allemands et à la personnalité peu audacieuse d’un chancelier social-démocrate élu “par défaut” en 2021.
- L’arrivée au pouvoir de F. Merz, qui s’est toujours présenté comme l’anti-Merkel, pourrait-elle relancer l’Europe ?
- Son accession au pouvoir survient à un moment de bascule stratégique pour l’Europe, où les menaces extérieures se doublent d’une crise économique intérieure.
- Elle a aussi déjà fait bouger les lignes en Allemagne.
- Déjà dans le raté inédit du scénario de son élection le 6 mai 2025. Merz a dû en effet attendre le second tour pour être élu Chancelier.
- Il débute son mandat dans un climat de défiance, frappé d’emblée par des dissensions internes à sa coalition CDU-SPD et aux défiance dans son propre camp.
- Il incarne cependant, à 69 ans, un conservateur pur, ancien financier, dont le style direct tranche avec l’atavique prudence allemande des années Merkel.
- Affaibli par l’échec au premier tour et par une extrême droite (AfD) en progression, F. Merz n’a d’autre choix que de démontrer rapidement sa capacité à gouverner et à incarner un « leadership » européen, et l’indépendance face aux Etats-Unis.
- Il s’agit d’une position qu’il a déjà clairement assumée publiquement.
- Son discours inaugural est clair sur ses objectifs qui sont de :
- réarmer l’Allemagne,
- restaurer sa compétitivité,
- assurer une fermeté migratoire
- et resserrer les liens avec Paris et Varsovie.
- En effet, l’annonce d’un plan d’investissement public massif de 500 milliards d’euros sur dix ans revient sur une promesse de campagne :
- ne pas assouplir les règles nationales très strictes de dépenses budgétaires.
- L’objectif poursuivi est de sortir l’économie allemande de son marasme, pour celle qui a connu deux années de récession, et de désindustrialisation rampante du fait d’un manque d’investissement criant.
- La levée du frein constitutionnel à la dette acte dès lors un tournant historique.
- Cette relance ambitieuse vise à moderniser les infrastructures et à financer un réarmement militaire, dans un contexte de menace russe accrue et d’incertitude quant à l’avenir de l’OTAN.
- Toutefois, ce virage inquiète une partie de sa base conservatrice, qui redoute un retour de l’inflation et un affaiblissement des finances publiques.
- Sur le plan politique, Merz devra également contenir la poussée de l’AfD.
- Prospèrant sur le rejet de l’immigration et la défiance envers les élites, le parti d’extrême droite avait réclamé de nouvelles élections législatives après l’échec au premier tour de Merz, remettant ainsi en cause sa future légitimité électorale.