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À quoi bon le Brexit si le système de régulation britannique reste dominé par les normes européennes ? Ainsi débute le raisonnement de Michelle Donelan, secrétaire d’État britannique au numérique qui entend remplacer le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) de l’Union européenne par un système national.

  • En s’affranchissant des règles sur la collecte et la protection des données privées, le Royaume-Uni prend une option sur les innovations à venir dans le domaine du Big Data.
    • M. Donelan déclare que les bénéfices des entreprises ont été plafonnés d’environ 8 % en raison de la mise en œuvre actuelle du RGPD, affirmant que les petites entreprises ne peuvent pas supporter les procédures administratives coûteuses de la législation mise en place dans le cadre de l’UE.
    • Toutefois, derrière l’enjeu économique se profile aussi celui des droits numériques et de la protection de la vie privée, garantis par le RGPD.

Indiscutablement, les normes européennes de protection de l’État de droit sont les premières visées par les ambitions dérégulatrices des représentants tories favorables au Brexit.

  • Ainsi, après avoir déjà sous-traité au Rwanda (cf. EIH) la gestion de ses demandeurs d’asile, le Royaume-Uni souhaite aussi mettre fin aux demandes d’asile aux migrants qui traversent la Manche, comme l’a annoncé la ministre de l’intérieur Suella Braverman, le 4 octobre 2022, au congrès du parti conservateur à Birmingham.
    • Dans la continuité des orientations anti-migrants post-Brexit, la ministre se justifie en expliquant qu’il y a « trop de demandeurs d’asile qui abusent du système » et que ces derniers ne répondent pas « aux besoins de l’économie ».
  • Depuis le début de l’année, plus de 33500 personnes ont traversé la Manche, ce chiffre est en constante augmentation, depuis 2018, malgré les promesses du parti conservateur de le réduire.
  • Les organisations de défense des droits des migrants ont dénoncé une déclaration en contradiction avec l’opinion de la population britannique qui, selon de récents sondages, est majoritairement favorable à l’accueil des migrants, et semble préoccupée plutôt par la crise du coût de la vie.
  • Les chiffres du ministère de l’intérieur britannique montrent que 94% des quelque 50 000 migrants arrivés au Royaume-Uni par des embarcations de fortune, entre janvier 2018 et juin 2022, ont demandé l’asile, et 86% d’entre eux l’ont obtenu.
  • Étant ici précisé que la réponse à une demande d’asile n’est pas tant politique que juridique : chaque décision relative à une requête répond aux critères fixés par la Convention de Genève.

Last but not least, la ministre a aussi menacé d’utiliser la force policière pour arrêter les manifestations contre le changement climatique organisées par Just Stop Oil et Extinction Rebellion, déclarant que « la police doit avoir tous les pouvoirs nécessaires pour stopper ces manifestants qui utilisent des techniques de guérilla et déclenchent le chaos.”

  1. Il existe un droit fondamental à manifester protégé par la Convention européenne des droits de l’Homme qui peut éventuellement être limité pour des considérations d’ordre sécuritaire.
    • Toutefois, comme vu lors du précédent de l’EuroPride de Belgrade (V. EIH), décideurs publics et représentants des manifestations doivent s’assurer l’un l’autre du respect à la fois du droit à manifester que celui de vivre en sécurité.
    • Reste à voir si les acteurs en présence sont disposés à discuter de ces éléments à assurer, pour garantir le bon fonctionnement de l’État de droit.