J’ATOME, MOI NON PLUS 

Le couple franco-allemand peut-il résister à la fission de l’atome ? Sous la pression de l’urgence climatique, les objectifs de décarbonation de l’énergie se traduisent par des stratégies diamétralement opposées de part et d’autre du Rhin. Alors que la France veut “en finir avec les fantasmes autour du nucléaire” comme le confiait à Contexte avant l’été la ministre, le chancelier allemand déclare que le modèle nucléaire est un “cheval mort” – confirmant le démantèlement prévu des dernières centrales du pays. 

  • À la tête d’une coalition tripartite où les Verts, farouches et historiques opposants à l’atome, s’opposent aux libéraux sur de nombreux sujets, dont l’énergie, Olaf Scholz doit faire face à une équation de plus en plus complexe pour financer la transition énergétique.  
  • Elle doit indiscutablement se faire hors du gaz russe tout en préservant la dynamique d’une industrie nationale dont la compétitivité reposait sur cette source d’énergie abondante et bon marché.  
  • Comme le notent de façon lapidaire et ironique certains observateurs, “ce qui avait commencé comme un projet de modernisation s’est rapidement transformé en un amalgame d’absurdités :  
  • le SPD veut subventionner les industries non compétitives,  
  • les Verts préfèrent le charbon au nucléaire,  
  • et la seule politique perceptible du ministre du budget et chef du FDP Christian Lindner est son soutien aux grosses voitures de sport”. 
  • Le temps n’est plus à “la concurrence libre et non faussée” et les grandes puissances industrielles européennes s’engagent sur la voie d’une concurrence de subventions qui pourrait s’avérer délétère pour l’UE et négative pour le Green deal.  
  • France et Allemagne s’opposent en particulier sur la question de savoir s’ils doivent être autorisés à subventionner les prix de l’électricité pour leurs utilisateurs industriels et, le cas échéant, de quelle manière.  
  • Dans le contexte d’une difficile réforme du marché de l’électricité, arrachée à la Commission par une intense pression de Paris, Madrid et leurs alliés, le ministre vert allemand de l’énergie, Robert Habeck envisage désormais des formes jusqu’ici inédites de subventions énergétiques – sur le modèle français ou espagnol, pour maintenir des prix raisonnables pour l’industrie nationale. 
  • De son côté, la France menace de faire cavalier seul pour réduire les prix de l’électricité, si ses propositions ne sont pas mieux prises en compte dans les compromis préparés par la présidence espagnole sur ce dossier. 
  • Ce conflit met en évidence le type de raisonnement à somme nulle qui prévaut des deux côtés du Rhin, alors qu’un éventuel accord pourrait permettre aux deux pays de subventionner leurs industries pendant de longues années, au détriment de tous, rappelle fort justement Politico. 
  • Pendant ce temps, le couple franco-allemand continue de se déchirer aussi sur le soutien au nucléaire.  
  • Ainsi, l’Italie, qui avait pourtant officiellement abandonné le nucléaire par deux référendums, d’abord en 1987 dans la foulée du traumatisme de Tchernobyl, puis en 2011, semble avoir complètement changé de position, et envisage de reprendre un programme nucléaire.  
  • L’affrontement entre partisans et opposants de l’atome pourrait bien avoir raison de l’esprit européen et de la méthode de coopération qui le caractérisait.