On votait en République tchèque les 4 et 5 octobre dernier. Le mouvement ANO dirigé par Andrej Babiš a remporté la première place avec environ 34,5% des voix et 80 sièges sur 200. C’est une victoire pour le groupe d’extrême-droite Patriotes pour l’Europe de V. Orban, au Parlement européen, où siègent aussi le RN et la Lega. Comme aux élections européennes de 2024, les libéraux et le bloc central sont en recul net : l’alliance sortante Spolu (coalition de centre-droite) conduite par le Premier ministre Petr Fiala s’est effondrée à près de 23–24 %.
- Pendant la campagne électorale, A. Babiš a défini son propre type de populisme, promettant de diriger le pays comme une entreprise.
- Sa campagne comportait des éléments similaires à celle de D. Trump, comme les casquettes rouges.
- Mais au lieu de se présenter devant de grandes foules, A.Babiš a principalement fait campagne devant de petits groupes, vêtu d’un survêtement et d’un jean, avec des t-shirts arborant les slogans « Czechia, tout pour vous » ou « Czechia – contre la folie verte ».
- A. Babiš est un milliardaire qui aime se présenter comme le porte-parole des pauvres et des opprimés.
- Les résultats suggèrent que cela a fonctionné.
- Cependant, pour atteindre une majorité d’environ 108 sièges à l’assemblée parlementaire tchèque, ANO ne disposant pas de majorité, A. Babiš doit entamer des négociations de coalition ou d’alliance de soutien avec des partis plus petits.
- Notamment le parti d’extrême droite Freedom and Direct Democracy (SPD) et un parti de droite-populiste « Motoristes pour nous‑mêmes » .
- Ce dernier mobilise les jeunes hommes en jouant sur la frustration liée à la « route », l’automobile et la masculinité.
- Il mêle un discours anti-écologiste, pro-voiture et anti-élite, reflétant une nouvelle vague de « politique de la colère routière ».
- Cette dynamique dépasse la Tchéquie et illustre une tendance en Europe : des catégories d’électeurs masculins se détournent des partis traditionnels au profit de mouvements de revendication identitaire et culturelle.
- Cela peut paraître marginal, mais la poussée populiste repose justement sur le rejet des politiques environnementales, de l’affirmation des femmes et des minorités et une affirmation viriliste de puissance personnelle et collective – très bien illustrée par D. Trump.
- C’est surtout un mouvement de défiance général envers l’Etat de droit.
- Une défiance qui touche aussi les démocraties établies comme la France.
- Il y avait déjà eu les propos récents d’un ministre relativisant sans vergogne l’importance de l’Etat de droit face au vote démocratique.
- La condamnation de l’ancien président Nicolas Sarkozy a fait ressurgir les polémiques concernant l’indépendance de la justice qui souligne la vulnérabilité de l’Etat de droit en Europe.
- Le scrutin tchèque marque le retour de la République tchèque dans la dynamique populiste qui anime la politique européenne depuis 2010.
- C’est aussi un retour politique majeur pour A. Babiš avec un défi énorme pour la formation d’un gouvernement stable.
- La stratégie populiste d’ANO a affaibli ses alliés potentiels en siphonnant des voix des partis radicaux mais il doit désormais négocier avec eux pour former une majorité.
- Le parti oscille désormais entre conservatisme social et politiques de gauche sur l’économie, tandis que l’opposition libérale (« bloc démocratique ») conserve des marges de manœuvre pour mobiliser des électeurs mécontents.
- Une « victoire à la Pyrrhus », explique le blog LSE, mais victoire tout de même.