Comme évoqué la semaine dernière (EIH 7/7/25), D. Trump a bien décalé la mise en œuvre des tarifs douaniers excessifs sur les pays européens. Il semble néanmoins s’être décidé cette fois-ci, de manière certaine aujourd’hui, en imposant 30% de droits de douane au 1er août 2025. Dans sa réaction officielle, la présidente Ursula von der Leyen évoque des « contre-mesures proportionnées ».
- Il faut toutefois compter avec le décalage temporel dû aux processus décisionnels de l’Union, en contraste avec l’impulsivité étatique outreatlantique.
- L’UE s’inscrit dans un temps géopolitique assez particulier, avec un groupe d’Etats qui cherche à explorer toutes les options et à renforcer ou recréer des alliances économiques avec d’autres régions du monde.
- Cela s’observe par exemple avec un rapprochement économique entre l’Union européenne et l’Inde, qui a pour but de finaliser un traité de commerce d’ici la fin de l’année.
- Cette volonté commune a déjà été annoncée fin février par Ursula von der Leyen, dans une déclaration conjointe avec le Premier ministre Narendra Modi.
- Elle fait son chemin dans les sphères européennes, par le biais des recherches et des publications dans divers think tank européens, dont le centre de réflexion Bruegel livre une analyse des enjeux.
- L’objectif est clair, renforcer des relations favorables au libre-échange, avec les partenaires « like-minded », comme le Canada de Mark Carney .
- L’UE, en tant que bloc, représente 17 941,8 milliards d’euros de PIB, soit la 3ème puissance économique mondiale (au coude-à-coude avec la Chine).
- L’Inde est 5ème avec un PIB de 3612 milliards d’euros.
- Précision importante : il s’agit de la première démographie au monde mais l’Inde a aussi un PIB par habitant très faible, et souffre de nombreuses disparités économiques, avec des poches de pauvreté très persistantes.
- Néanmoins, des économies émergentes, c’est l’économie qui a la plus forte croissance en ce moment.
- Représentant 2,3% des exportations mondiales et 3,4% des importations de biens, l’Inde représente une opportunité claire pour l’UE.
- Un accord de libre-échange permettrait une meilleure pénétration des marchés indiens par les grands groupes européens, notamment pour les services.
- Similairement, cela faciliterait les exportations indiennes, stimulant donc de facto les exportations et donc l’économie indienne.
- Quelques freins sont néanmoins importants à mentionner, notamment sur les normes européennes, pour l’instant bien trop élevées pour la majorité des biens indiens (c’est l’une des barrières non-tarifaires les plus classiques). Avec un temps d’adaptation, cela peut se régler sans trop de difficultés, mais avec un investissement conséquent.
- Il est également intéressant de noter la relative difficulté des négociations de ce traité de commerce.
- Comme relevé dès 2023 par la Direction Générale du Trésor, les relations peuvent être compliquées avec des négociateurs indiens peu au fait des objectifs à long terme.,
- Ils n’ont pas vraiment changé leur positionnement depuis une décennie et semblent chercher à aboutir rapidement à un accord initial.
- Cet accord visé serait donc défavorable pour l’UE afin d’obtenir un accès au marché européen sans réelle réciprocité.
- Cette volonté est clairement identifiée par les négociateurs de la Commission qui s’y refusent catégoriquement en privilégiant l’aboutissement direct d’un accord exhaustif.
- En outre, comme pour l’accord avec le Mercosur (EIH 24/11/24), la réprobation des Etats membres avec un fort secteur agricole, comme la France – un rapport récent du ministère de l’Agriculture rappelle qu’un accord avec l’Inde présente plus de risques que d’opportunités, notamment pour les filières bovines et sucrières.