Les luttes d’influence passent aussi par l’accès à l’information et la guerre des récits. La contre-offensive ukrainienne en est une illustration évidente. Pour Moscou, il faut qu’elle soit perçue comme un échec pour décourager les soutiens occidentaux. Pour Kiev, il faut qu’elle soit le récit d’un succès pour les raisons exactement inverses.
- Il semblerait que la Russie soit parvenue à ses fins : les progrès de l’Ukraine sur le front n’ont que trop peu été perçus en Occident, suite à un travail – très réussi – de désinformation de la part de la Russie.
- Dans cet article du Kyiv Independent les différentes avancées militaires ukrainiennes de ces dernières semaines sont répertoriées, en s’appuyant sur les données très fiables de l’Institute for the Study of War.
- Il y est décrit également la dégradation des unités russes.
- Cependant, ces avancées n’ont été que faiblement relayées en Europe et aux Etats-Unis.
- Dans une enquête, Mediapart revient sur les différentes techniques utilisées par les services de désinformations russes.
- Les Russes annoncent des offensives ukrainiennes qui n’ont jamais eu lieu, ainsi ils peuvent affirmer que leurs forces les ont repoussées.
- Les Ukrainiens occupent peu l’espace informationnel, contrairement aux Russes.
- La Russie sort finalement gagnante de cette guerre informationnelle : elle façonne le récit et influence la perception du conflit.
- Dans ce contexte, l’Ukraine a essuyé un revers étonnant. La rupture du front européen était attendue à Berlin ou ailleurs, mais certainement pas à Varsovie.
- La Pologne était considérée comme l’un des alliés les plus fidèles de l’Ukraine, présent à ses côtés depuis l’invasion russe de février 2022.
- Elle a pourtant déclaré ne plus fournir d’armes à l’Ukraine.
- Cette décision intervient après que le président ukrainien a tenu des propos qui ont déplu aux Polonais.
- A la tribune de l’ONU, V. Zelensky avait indirectement accusé la Pologne de servir les intérêts russes.
- Cela s’ajoute au différend sur les productions agricoles (cf. EIH précédents).
- Les conséquences des annonces de Varsovie ne devraient pas être perceptibles directement car la Pologne sert toujours de point de transit pour l’approvisionnement d’armes venant de divers pays.
- Dans son éditorial, Pierre Haski explique que ce retournement de situation brutal peut s’expliquer surtout par les élections législatives du 15 octobre 2023.
- Les élections s’annonçant serrées, le PiS au pouvoir compte sur le soutien des agriculteurs.
- Ces derniers s’inquiètent de la baisse des prix des céréales depuis que les importations de céréales ukrainiennes ont augmenté.
- Au-delà, comme l’explique cette analyse d’Agenda Publica la Pologne, aurait pu clairement tirer parti de cette situation géopolitique au sein de l’UE.
- Il semble de plus en plus évident que la poursuite du positionnement politique eurosceptique a gâché cette opportunité.