L’Europe est une communauté politique. Dans l’Union, les questions nationales ne le restent jamais longtemps et certains problèmes politiques intérieurs peuvent trouver leur dénouement en passant par Bruxelles. C’est particulièrement le cas du Premier ministre Pedro Sanchez depuis la réussite de son pari électoral (cf. EIH précédente). La route pour son maintien à la tête de l’exécutif le place dans les mains de Carles Puigdemont, ancien Président de la Catalogne, député européen élu en 2019 – et “exilé politique”, interdit de retour en Espagne tant que les poursuites pour avoir organisé un référendum interdit pour l’indépendance ne sont pas abandonnées.
- Depuis le mois de juillet, Pedro Sanchez cherche des alliés pour former un gouvernement
- Ce sont les 7 députés du Congreso de son parti “Unis pour la Catalogne” qui tiennent les clés d’une potentielle investiture pour Sanchez.
- Parmi les conditions posées au Premier Ministre socialiste, se trouve la reconnaissance du Catalan comme langues officielles des institutions de l’UE.
- La reconnaissance des autres langues régionales du Royaumey compris.
- Le multilinguisme fait partie des principes démocratiques reconnus officiellement et mis en œuvre par l’UE, inscrits dans les traités (art. 55).
- C’est d’ailleurs aussi l’une des raisons pour lesquelles l’anglais est resté une langue officielle malgré le Brexit (l’Irlande ayant officiellement fait adopter le gaélique irlandais comme langue nationale).
- Le Congreso de diputados a récemment accepté l’utilisation de ces trois langues co-officielles dans ses institutions, par le biais d’une résolution.
- Cette décision a été saluée par les partis de gauche et les formations nationalistes régionales et fortement critiquée par les partis de droite.
- Tout particulièrement par l’extrême-droite Vox, dont le nationalisme unitaire est présenté comme étant né de la réaction au nationalisme catalan.
- L’Espagne, par le biais de ses représentants, a donc demandé que ces langues deviennent des langues officielles de l’UE
- Les 26 autres ne se sont pas encore prononcés et ont reporté le débat.
- Il est encore trop tôt pour prendre une décision, les ministres des affaires européennes craindraient un effet domino, avec d’autres langues régionales.
- Madrid fait valoir que le Catalan n’est pas une langue minoritaire, vu qu’elle est parlée par plus de 10 millions de personnes.
- Ce qui est plus que beaucoup de langues officielles européennes.
- L’Espagne se propose en outre de prendre en charge les coûts supplémentaires.
- En effet, cela impliquerait la traduction de tous les documents de l’UE (traités, communiqués…) et la mise à disposition de traducteurs et d’interprètes catalans.
- Alors qu’aucun autre Etat membre n’a fait usage de son droit de veto à cette proposition, P. Sanchez peut espérer emporter cette décision européenne aux conséquences nationales.
- Ce qui peut être un beau symbole pour clôturer la présidence espagnole du Conseil de l’UE.
- Loin de se contenter de cette victoire, les nationalistes catalans réclament une loi d’amnistie pour les personnes impliquées dans le référendum illégal lié à la déclaration d’indépendance de la Catalogne, le 1er octobre 2017
- Les prisonniers avaient déjà été graciés par le chef du gouvernement en 2021, mais partiellement – ils restent sous la menace d’annulation en cas de délit.
- Une amnistie changerait la donne juridique et politique.
- Bien entendu, les partis de droite s’opposent à toute amnistie.
Et voilà la Catalogne au centre du jeu politique européen.