INSTITUTIONNALISATION DE L’INCERTAIN

C’est ce que semble malheureusement vouloir faire la Hongrie, comme le rapporte Gwendoline Delbos-Corfield, membre de commission LIBE du Parlement européen, après trois jours d’échange avec des membres du gouvernement hongrois mais aussi de l’opposition, des journalistes, et des associations, au cours d’une mission officielle organisée depuis 2018.

  • L’objectif est d’évaluer le respect des libertés de la presse et académique, l’indépendance de la justice, le droit des minorités et le contexte plus large de l’Etat de droit sur le terrain.

  • La conclusion de ces entretiens est alarmante : l’Etat de droit en Hongrie se réduit depuis 2018.
    • Le gouvernement surveille des journalistes en  utilisant  le logiciel Pégasus, la proportionnalité des opinions dans les médias n’est pas respectée, l’indépendance de la justice n’est  pas garantie, la transparence sur les  fonds  européens  n’est  pas assurée ; de quoi mettre en place l’article 7 du traité de l’UE qui annulerait l’attribution des fonds du plan de relance européen (soit 7,2 milliards d’euros).
    • La Commission devrait en profiter pour activer le mécanisme de conditionnalité liée à l’État de droit pour l’accès aux fonds de l’UE ; une nouvelle arme juridique qui requiert la majorité qualifiée et non pas l’unanimité comme la procédure prévue par l’article 7.

Le Parlement européen pousse fort pour que la Commission utilise cette prérogative, avant la fin octobre, pour sortir de « l’impasse » sur les plans de relance hongrois et polonais.

  • Budapest refuse d’ajouter dans ses « jalons », pour bénéficier des fonds européens, de nouvelles mesures contre la corruption et le tribunal constitutionnel polonais  ne s’est toujours  pas  prononcé sur la question de l’articulation des ordres juridiques national et européen.

  • Pour autant, selon plusieurs sources, la Commission ne compte pas refuser les plans de relance – contrairement aux demandes des eurodéputés du groupe Renew.

The Good Lobby, un groupe de  pression citoyen en faveur d’une plus grande implication democratique en Europe indique cependant que si les plans de relance sont acceptés sans que les pays ne mettent en œuvre les exigences de l’Etat de droit, les institutions européennes risquent de violer la loi de l’Union.

Ce débat qui est présenté comme politique est donc aussi largement juridique.